domaine de frévent

domaine de frévent

samedi 13 juin 2015

Désherbage obligatoire...



Voilà bien le meilleur moyen d’apprendre le nom des mauvaises herbes : Biner !
Il suffit de prendre le temps de les retrouver sur un manuel pour en connaître le nom. Car à force de les voir apparaître ici et là tout au long de la saison, on devient vite curieux de faire les présentations.
Avec l’été qui arrive, j’améliore donc mes connaissances en matière de botanique. La maîtrise des matières actives de produit chimique comme le Paraquat, le Glyphosate et leur façon d’agir sur les végétaux n’est plus à l’ordre du jour.


Je prends donc la binette dans mes deux mains, je courbe le dos et je la plante dans la terre de façon à soulever les racines des adventices en les laissant sécher au soleil. Les mouvements doivent être lents et réguliers pour ne pas m’épuiser. Malgré cela et très vite, les coups portés au sol sont de moins en moins précis, trop profonds, trop éloignés les uns des autres ou pas assez ciblés sur la plante à arracher. Je me dis qu’il faut ralentir encore, même si la cadence parait lente, pour gagner en endurance et venir à bout de la besogne. Les muscles se contractent et le corps s’échauffe d’autant plus qu’il se trouve à présent arrosé des premiers rayons du soleil.

Je me relève pour souffler un peu. Je me détends et sens les battements de mon cœur reprendre un rythme plus doux. Bouche grand ouverte pour aspirer l’oxygène qui me manque, je regarde devant moi et je prends conscience de l’ampleur du travail qui m’attend. Tous ces massifs décoratifs n’attendent que mon passage laborieux pour s’épanouir et apporter quelques notions de couleur et de perspective au milieu du tapis engazonné. Il n’y a pas de temps à perdre, car l’herbe est envahissante et pénalise de jour en jour le développement des plantes d’agréments.

Alors je reprends mon outil et recommence à travailler la terre comme le faisaient les jardiniers d’une époque où il n’existait pas de produit de synthèse. Certains devaient accomplir ce travail pendant toute une journée, sans interruption. Je dois bien pouvoir en faire une heure ou deux. D’une cadence régulière, Je me remets à gratter la terre de surface par petites portions en prenant soin de ne pas en oublier une. Je rencontre sur mon chemin liseron, orties, cardamines, amarantes en pleine croissance puis des renoncules déjà bien développées. Pour ces dernières une fois retournées, j’émiette la terre des racines en tapant dessus avec le revers de la binette comme j’ai vu faire mon père autrefois. Mais je ressens déjà une gêne dans le bas du dos. Je me redresse pour la soulager et me reposer un peu, en appui d’une main sur le manche en bois. En me retournant, je vois tous les cadavres laissés derrière moi, recouvrir le sol. Ils commencent à se défraîchir sous l’action asséchante du soleil. Ce soir, ils ne se remarqueront plus.

Enthousiasmé par ce résultat, mon ardeur décuple d’intensité. C’est avec une transpiration croissante que j’attaque une zone de chiendent. Au détourage de chaque rosier, je suis obligé d’y mettre les mains (gantées) pour arracher l’herbe sans abîmer les nouvelles pousses. Cela me conduit à me courber d’avantage au-dessus du sol et accroît la petite douleur dans le dos. Je suis contraint à me redresser plus souvent et à travailler moins longtemps. Devant ces difficultés, j’élabore dans ma tête une stratégie pour étaler cette tâche sur plusieurs journées. Je décide de m’y consacrer une demi-heure par jour, à la fraîcheur du matin de préférence.

Au bout d’une semaine, faute de courage suffisant ou de résistance physique adéquate, il devient évident que je ne pourrais pas, vaincre l’invasion de cette herbe sur la totalité du parc. Après les massifs floraux, il faudrait désherber les allées, certaines terrasses, les bordures de muret, l’embase de clôtures grillagées, l’entourage des arbres, puis surtout… Recommencer ce circuit plusieurs fois pendant la période estivale. Car chaque mois à son lot de variétés différentes. J’ai effectué le plus facile qui consiste à planter un outil dans de la terre meuble. Cela requiert plus d’efforts de le planter dans les cailloux ou au contact de pierres.

Fort de cette constatation et comme chaque année, je ressors donc mon pulvérisateur à dos. Je le rempli d’eau et y mélange le Glyphosate, tant adulé hier sous une marque commerciale, et tant décrié aujourd’hui. J’attends le soir, moment idéal où le vent est tombé et je pulvérise cette chimio là ou je ne veux plus voir de mauvaises herbes. En une heure et sans efforts, tout est fini et dans une quinzaine de jours les effets seront visibles.

Beaucoup de choses sont à mettre en place avant de pouvoir mettre de côté l’utilisation de ces produits chimiques. Pour rendre cohérent l’interdiction de les utiliser, il ne suffit pas de demander aux jardiniers de prendre la binette et de supporter sueur et douleurs. Il faut repenser totalement la conception du jardin.

En commençant par les allées. J’ai appris récemment que les allées des jardins de château dit ‘à la française’ étaient autrefois délimiter par des plaques métalliques enfoncées verticalement dans le sol, qui empêchaient tout déplacement de terre débordant dans les cailloux. Je pense devoir m’inspirer de cette pratique pour Frévent. Je pense aussi, même si ce n’est pas d’actualité, recouvrir les petits cailloux des allées d’un revêtement bitumeux pour éviter toutes repousses au travers.
Je prévois de refaire les terrasses posées sur lit de sable. Elles doivent être maçonnées et posées sur dalle béton. Ce travail est déjà entamé sur certaine plate-forme mais reste à poursuivre sur d’autres.

Pour les massifs d’agrément au milieu de la pelouse, j’envisage l’acquisition d’un broyeur de branche sur tracteur pour étaler des copeaux de bois en épaisseur sur la terre nue. Privée de lumière, les mauvaises herbes se feront plus rares. J’envisage d’en déposer aussi le long des murets en pierre et sur le tour des arbres.

Je n’ai pas la résistance physique des hommes de la terre d’autrefois. Je reste d’ailleurs dubitatif quant à leur courage dans la durée. La binette reste pour moi synonyme de fatigue, mal de dos, tendinites… sueur qui dégouline ! Je ne suis pas prêt à généraliser son utilisation. Il me parait d’ailleurs bien utopique de penser qu’une réponse écologique puisse se trouver dans un retour en arrière pour l’homme. J’adapterais au domaine de Frévent, des solutions de bon sens pour limiter l’utilisation des produits chimiques. Elles s’inscriront dans le temps et une fois en place, le désherbage obligatoire ne me demandera pas plus d’efforts que de marcher avec un pulvérisateur dans le dos.


Hervé


samedi 6 juin 2015

Période d'incubation !




C’est la dernière ligne droite avant le solstice d’été. Si l’on est attentif et surtout observateur on peut, en se promenant dans le parc de Frévent, croiser le regard protecteur de volatiles en attente de futures naissances. Elles couvent !


Paonne, Canne, dinde, oies sans oublier les poules, toutes sont pelotonnées sur leurs œufs pour y diffuser une chaleur constante qui permet le développement de leurs petits. Pour certaines, cela se passe en sous-bois, sur un tapis de feuilles mortes, pour d’autres c’est dans les grandes herbes au bord de l’étang. Les poules elles, préfèrent patienter sur la paille, dans leur poulailler.
Mais il faudrait être bien naïf pour penser que dans un mois le domaine de Frévent puisse devenir une petite nurserie. Plus que pour une gestation, il y a bien des obstacles à franchir afin de voir des nouveaux nés arriver à terme de la programmation.

Pour la dinde, c’est foutu ! Elle a couvé ses quatorze œufs pendant 24 jours, et le 25ème au petit matin, je l’ai retrouvé ‘raide-morte’ au pied du nid. Les œufs étaient froids et les petits à l’intérieur étaient morts aussi. Que s’est-il passé ? Je ne le sais pas. Il n’y avait aucune trace de sang ni de blessures. Cela restera un mystère, Mais il est sûr qu’il n’y aura pas de petits dindonneaux cette année dans le parc. Sachez donc que le dindon si vous le croisez, est devenu veuf !

Pour les deux paonnes, cela semble compliqué pour l’une et fragile pour l’autre. En considérant que le mâle, un peu jeune (deux ans) ait bien fait son travail pour les féconder toutes les deux, on peut espérer obtenir huit poussins. En effet, elles ont pondu quatre œufs chacune. La première dans la volière, où elle ne couvera pas parce que trop dérangée par les autres animaux et la seconde, dans la forêt où elle s’est mise à couver. Cette dernière est bien dissimulée par les ronces et est éloignée de tout passage mais restera à la merci des prédateurs pendant trente jours, notamment de mes chiens de chasse que je m’efforce non sans mal de surveiller. Mais en écrivant ces lignes je me rends compte qu’en fait je ne suis pas sûr que les œufs ne proviennent pas tous de la même femelle. (Elles ne présentent aucun signe distinctif)

Quoi qu’il en soit, j’ai placé les œufs qui étaient dans la volière sous une poule qui s’est mis à couver. J’ai substitué les œufs de la poule aux œufs de la paonne, sans qu’elle s’en aperçoive (les œufs sont pourtant plus gros !). Cela fait déjà cinq jours et pour le moment elle semble s’en être accommodée. J’espère qu’elle ne sera pas trop frustrée lors de l’éclosion …

Pour la canne, c’est mal partie, et par ma faute. Je me suis mis à débroussailler le flanc de digue trop tôt et j’ai dégagé le nid de madame, bien caché dans les grandes herbes. Celle-ci continue à couver, mais elle est à découvert des renards et autre malveillants (rapace, corbeau). J’essaierais bien de mettre en place un camouflage improvisé, mais je doute que cet animal sauvage, il s’agit de colvert, n’en soit pas perturbé. Nous verrons bien…

Parmi les nids dont j’ai connaissance aujourd’hui, il y en a aussi deux placés sous le toit de la terrasse de la cabane ‘la Pertuisane’. Il s’agit d’une famille ‘Roitelet’ et d’une famille ‘Merle’ qui, vous l’imaginez bien, sont fortement dérangés par la présence humaine. En espérant qu’un client n’est pas la curiosité d’aller compter les œufs…

Je me souviens qu’une année, des enfants de touristes étrangers avaient récupéré les dix œufs d’une oie dont le nid était dissimulé sous les thuyas au bord de l’étang. Ils les avaient emmenés dans leur chambre en gîte pour s’amuser un peu. Je m’étais aperçu de cette exaction et je leur avais demandé (in english) où étaient passés les œufs. Une heure après, tout avait été replacé dans le nid mais cela avait fort déplu à madame oie qui avait ensuite délaissé sa couvée.

Bon, je vous tiendrais informé de l’issu de ces processus reproductifs vers la fin du mois de Juin, mais je ne serais pas surpris que sur le nombre d’œufs pondus, que je viens d’évoquer, il n’y ait aucun petit cette année. C’est un parcours semé d’embuche qui attend les animaux à plume chaque année dans cette période d’incubation. Et si des petits apparaissent, d’autres épreuves seront à affronter, surtout dans les tous premiers jours. Mais chaque année en ce mois de juin, on garde le bon espoir de voir trottiner quelques poussins derrière leurs parents sur fond de pelouse bien tondue.

Hervé