domaine de frévent

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mercredi 27 janvier 2016

De brume et de lumière...



Juste un petit moment pour écrire un peu. Oui mais écrire quoi ! Car il ne se passe pas grand-chose actuellement au Domaine ou du moins pas qui puisse se raconter dans ce blog.
Les gîtes se remplissent de semaine en semaine par des sociétés prenant contrat en Île de France, les chambres d’hôtes sont calmes (les Parisiens restent à Paris) et les cabanes ne sont occupées que les week-ends pour des nuits Trekking (en Français : de grande randonnée).

La semaine dernière la météo est venue apporter un peu de froid dans nos grands arbres, jusqu’à moins huit le matin. Cela m’a inspiré le titre de ce feuillet et des photos dont je vous présente ici quelques clichés (retouchés évidemment). Cela va contraster et apporter une petite note de fraîcheur bienveillante à la suite du texte. 

Car entre temps, est venu se glisser dans mon emploi du temps une petite mésaventure que je vais prendre plaisir à vous raconter maintenant. N’espérez pas qu’elle soit épique mais elle présentera à certains d’entre vous une facette de mon activité auquel ils ne s’attendent pas. (On s’éloignera encore un peu de ‘bienvenue chez nous’, que j’affectionne tant comme vous le savez !)

L’action se passe peu de temps avant l’arrivée du grand froid.

Lors d’un passage furtif derrière les chambres d’hôtes, dans un massif rocailleux, j’aperçois près d’un plant d’oseille pas encore gelé, une accumulation de papiers hygiénique en décomposition placé en tas. En grattant légèrement le sol je constate qu’en dessous, se trouve un bouchon en PVC de 100 (pour les connaisseurs) dont le couvercle est mis sur le côté. L’intérieur du tuyau est plein de ce que je vous laisse imaginer. Je ne suis pas surpris de la présence de ce tuyau qui débouche à ras du sol car c’est moi-même qui l’avais fait déboucher à cet endroit lors de l’installation de la fosse septique de la partie « tour et galerie ». Oui car à Frévent, la configuration des bâtiments impose la mise en place de plusieurs réseaux d’assainissement séparés.

C’est ma signature de faire déboucher les tuyaux enterrés, par des cheminées facilement utilisables en cas de mauvais fonctionnement des écoulements. Cela évite bien souvent d’avoir à creuser le terrain. Mais dans le cas présent ce ne fut pas le cas puisque le passage d’un furet ne suffit pas à rétablir l’écoulement des eaux sales.

La pluie arrive, et les chambres d’hôtes seront utilisées ce soir. Je coure chercher pelle, pioche, bêche à l’atelier et prend bien soin au passage de m’équiper en bottes et gants en caoutchouc.

Je récupère le plan d’oseille, qui je pense ne reviendra pas à cet emplacement et je commence à bêcher délicatement autour du tuyau en mélangeant terre et détritus. L’excavation commence et le tuyau m’entraine en profondeur. L’argile mouillée par la pluie colle à mes pieds et aux outils. Le travail devient vite éreintant… Alors je prends le temps de réfléchir un peu. « Et si par l’ouverture de la fosse j’arrivais à voir l’arrivée du tuyau et peut-être comprendre ce qui obstrue l’écoulement de l’eau. »

Je dégage soigneusement le sas d’ouverture de la grosse boite à caca, et j’ouvre… Ah la bonne odeur qui s’en dégage dans un nuage de vapeur chaude ! Une croûte grasse et marron s’est formée en surface, je l’enfonce avec un bâton pour essayer d’apercevoir l’entrée de fosse sur le côté à l’intérieur. Enveloppé des gaz de fermentation qui s’échappent alors, je ne vois rien si ce n’est une espèce de filtre qui baigne dans la mélasse odorante. Misère, la pluie se renforce et commence à s’infiltrer à travers ma veste. Essoufflé, les genoux à terre, je réfléchis à nouveau. Regardant l’intérieur de la fosse, je vois une serviette hygiénique qui tente une remontée en surface avant d’être entraînée par le fond !

Tiens, une petite photo pour faire du bien …


S’il y a un filtre, il doit être accessible par le dessus, alors en sueur je creuse pour découvrir une trappe. Je l’ouvre, sort le filtre qui n’est pas colmaté par des matières solides et découvre enfin l’arrivé du tuyau en PVC dans la fosse. Celui-ci est déboîte de son logement et désaxé. Il s’en trouve obstrué par une accumulation de déchets pâteux que je m’empresse de gratter avec le bâton. L’écoulement est rétabli, mais le tuyau doit être replacé correctement dans son emboîtement.

Alors il faut creuser en amont pour le découvrir sur une longueur suffisante permettant de le recaler et peut-être même pour le prolonger. Il y a des grosses pierres dans cette rocaille que je dois déplacer. Le terrain est trempé, les gants glissent sur les rochers que j’ai du mal à bouger. Je les prends à bras le corps et à genoux mais je n’ai pas assez de force pour les mettre sur le côté. Il me faut faire levier avec les outils. Les bottes s’enfoncent et glissent dans l’argile, j’ai du mal à tenir debout. J’ai chaud, les cheveux mouillés, la goutte au nez et tel un gueux, je suis couvert de boue de la tête au pied.

Je suis maudit ! La pluie ne cesse de tomber et le crépuscule arrive. Pourvu que je puisse trouver de quoi me dépanner à l’atelier sans être obliger d’aller acheter des raccords en magasin. J’ai une tête à faire peur cela me ferait perdre du temps et m’obligerait à installer une lumière en extérieur pour continuer la nuit tombée.

La chance tourne. Une fois le tuyau dégagé je réussis à le replacer convenablement sans trop de difficultés. Je sors de mon trou boueux pour me nettoyer moi et mes outils. Puis avec le tracteur, je vais chercher un peu de sable de rivière qu’il me reste dans un coin du parc, pour remplir la tranchée et entourer le tuyau. Cela sera plus facile à évacuer la prochaine fois. Je vais aussi éviter de replacer les rochers justes au-dessus (mais cela pourra attendre demain).

L’intervention aura durée quelques heures dans la précipitation et surtout, l’angoisse de ne pas trouver la solution avant la nuit. Je suis soulagé d’avoir pu y faire face seul, sans l’intervention d’un professionnel.
Mais de quel professionnel s’agirait-il dans le cas présent. Un plombier, un terrassier, un maçon ? Existe-t-il à notre époque des déboucheurs de chiotte !!! Qui aurait répondu présent pour une action de ce genre ? Et en combien de temps serait-il intervenu ? Et pour quel tarif ? Et avec quel engin de chantier qui défonce tout sur son passage ?

Ceci n’est pas une facette de l’activité hébergement de tourisme a proprement parlé. Non, mais quand on gère un domaine avec plusieurs logements et qu’il arrive une « tuile » de ce genre, et bien il faut y faire face et vite!
La réponse n’est pas de prendre des mesures, ni d’y mettre des sous, mais d’intervenir de suite, quel que soit le désagrément, pour rétablir le bon fonctionnement, car il y a urgence.

Voilà de quoi mettre au parfum les futurs candidats à l’ouverture d’une chambre d’hôtes.

Aller, une dernière photo qui sent bon la forêt en hiver et qui va nous détendre.


Hervé

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